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Buste de Diane – Pologne et Auktionshaus im Kinsky

En juin 2015, le Ministère de la culture polonais apprend qu’un buste de Diane, spolié durant la Seconde Guerre mondiale et disparu depuis, va prochainement être vendu à Vienne par la maison de vente Auktionshaus im Kinsky. Le Ministère contacte alors la société Art Recovery International. Avec l’aide de cette dernière et de l’Ambassadeur ainsi que du Consul général de Pologne en Autriche, le buste est restitué à la Pologne le 18 décembre 2015.

 

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Citation : Margaux Sitavanc, Alessandro Chechi, Marc-André Renold, « Affaire Buste de Diane – Pologne et Auktionshaus im Kinsky», Plateforme ArThemis (http://unige.ch/art-adr), Centre du droit de l’art, Université de Genève.

En juin 2015, le Ministère de la culture polonais apprend qu’un buste de Diane, spolié durant la Seconde Guerre mondiale et disparu depuis, va prochainement être vendu à Vienne par la maison de vente Auktionshaus im Kinsky. Le Ministère contacte alors la société Art Recovery International. Avec l’aide de cette dernière et de l’Ambassadeur ainsi que du Consul général de Pologne en Autriche, le buste est restitué à la Pologne le 18 décembre 2015.

I. Historique de l’affaire

Spoliations nazies

  • En 1940, un buste de Diane (ci-après « le Buste ») en marbre réalisé par l’artiste français Jean-Antoine Houdon et appartenant à la collection du Roi Stanislaw August (fin du XVIIIe siècle) est volé par le régime nazi au sein du Royal Łazienki Palace à Varsovie.[1]
  • Aux alentours de 1946, le Buste est supposé être acheté par un collectionneur autrichien, grand-père de l’actuel possesseur.
  • En juin 2015, le Ministère de la culture polonais (ci-après « le Ministère ») est informé que le Buste sera prochainement mis en vente à Vienne par la maison de vente Auktionshaus im Kinsky (ci-après « im Kinsky »). Le Ministère fait alors appel à la société Art Recovery International (ci- après « ARI ») afin d’obtenir l’aide nécessaire au retour de l’œuvre.[2]
  • En novembre 2015, un accord à l’amiable est trouvé entre les parties.[3]
  • Le 18 décembre 2015, le Buste est officiellement rendu à la Pologne.[4]

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II. Processus de résolution

Accord transactionnel – Facilitateur ad hoc – Médiation – Voie diplomatique

  • En mars 2015, im Kinsky mandate une experte afin d’obtenir confirmation que le Buste qu’elle s’apprête à vendre aux enchères est bel et bien l’œuvre de Jean-Antoine Houdon. Au terme de l’analyse[5], l’experte est convaincue que la sculpture qu’elle a examinée est bien le Buste disparu depuis 1940 et figurant sur une liste de biens spoliés non restitués, aspect sur lequel elle insiste auprès de la maison de vente avant d’également informer les autorités polonaises de ses conclusions. Une seconde expertise, cette fois conduite par la Pologne, met en évidence le veinage particulier du marbre, mais surtout la concordance entre le numéro d’identification figurant au dos de la sculpture et celui figurant dans les registres du Royal Łazienki Palace de 1937.[6]
  • L’ARI, spécialisée dans ce type de revendications, officie de manière pro bono pour le compte du Ministère afin de permettre une résolution à l’amiable entre la Pologne, im Kinzky et le possesseur actuel.[7]
  • Le processus de résolution se heurtant à d’importantes difficultés, l’Ambassadeur de la Pologne en Autriche (Artur Lorkowski) et le Consul général de la Pologne en Autriche (Andrzej Kaczorowski) sont appelés en renfort par l’ARI.[8]

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III. Problèmes en droit

Due diligence – Propriété

  • En droit autrichien, toute personne ayant acquis de bonne foi une chose volée n’est pas tenue de la restituer et peut donc en conserver la propriété.[9] Im Kinsky fait valoir que l’œuvre de Houdon a été achetée en 1946 par le grand-père de l’actuel possesseur, et que, partant, rien ne s’oppose à la vente ou n’impose une quelconque restitution.[10]
  • Le contenu des négociations n’ayant pas été révélé, on ne peut que supposer que la problématique de la due diligence afférant aux maisons de vente ou de leur moralité au-delà du texte de la loi[11] a été opposée par l’ARI et les divers acteurs polonais.

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IV. Résolution du litige

Restitution sans condition

  • En novembre 2015, les parties arrivent à un accord de restitution (dont on suppose, faute d’indications, qu’il n’implique pas de contreprestation) du Buste à la Pologne.
  • L’Ambassadeur de la Pologne en Autriche et le Consul général de la Pologne en Autriche sont réputés avoir apporté une aide précieuse (« priceless diplomatic support ») à l’aboutissement favorable du processus de résolution qui se heurtait auparavant à d’importantes difficultés.[12]
  • Le 18 décembre 2015, le Buste est officiellement rendu à la Pologne lors d’une cérémonie au Royal Łazienki Palace.

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V. Commentaire

  • Le Buste, ainsi que 56 peintures du Musée national de Varsovie, avaient été saisis par les nazis en 1940 et transportés au siège du gouverneur général Hans Frank à Cracovie. Les autorités polonaises estiment que ce sont près d’un demi-million d’œuvres qui ont été pillées ou détruites par les nazis pendant la Seconde Guerre mondiale.[13]
  • Plus que son importante valeur pécuniaire (estimée à 100 000 € par im Kinzky), le Buste étant un des deux seuls créés par l’artiste (le second appartenant à la National Gallery of Art de Washington, D.C.), les divers intervenants ont souligné la valeur historique inestimable de ce dernier et de son retour en Pologne.[14]
  • Dans le contexte de la restitution d’ouvres spoliées, l’intervention d’associations sans but lucratif à titre de facilitateurs n’est pas un procédé inédit. En 2002, l’International Foundation for Art Research et la Commission for Looted Art in Europe avaient permis le retour chez son propriétaire d’un dessin représentant la Libération de Saint-Pierre de prison. Dans cette affaire également, le droit du pays du possesseur actuel lui reconnaissait un titre de propriété valable, bien que ce dernier ne s’en soit pas prévalu en l’espèce.[15]
  • Plus généralement, cette affaire illustre la nette prévalence des modes alternatifs de résolution dans le cadre d’affaires de spoliations nazies au cours des quarante dernières années.[16]
  • En avril 2017, im Kinsky se trouve à nouveau sous le feu des critiques lorsqu’elle décide de mettre en vente un tableau de Bartholomeus van der Helst, œuvre dont la spoliation en 1943 aux fins de la constitution du futur Führermuseum de Linz est de notoriété publique. Encore une fois, la maison de vente argue que l’acquisition ayant eu lieu de bonne foi, rien ne s’oppose à la vente, les voies de recours ayant pour le surplus été épuisées. L’avocat de la famille spoliée dénonce une continuation du nazisme et des crimes nazis, causée par l’absence de restitution, et d’ajouter que l’Autriche, en se cachant derrière son système légal, bafoue toute considération morale.[17]

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VI. Sources

a. Doctrine

  • Chechi Alessandro/Renold Marc-André, Just and Fair Solutions: An Analysis of International Practice and Trends, in Fair and Just Solutions? Alternatives to Litigation in Nazi Looted Art Disputes: Status Quo and New Developments [Campfens Evelien, édit.], Eleven Publishing, 2014, p. 187 ss.

b. Documents

  • Anne Laure Bandle, Alessandro Chechi, Marc-André Renold, “Case Liberation of Saint Peter from Prison – Feldmann Heirs and Private Person,” Platform ArThemis (http://unige.ch/art-adr), Art-Law Centre, University of Geneva.

c. Médias

  • Connolly Kate, Nazi-Looted Painting to Be Auctioned as Owners’ Heirs Fail to Halt Sale, in The Guardian, Berlin, 2017 https://www.theguardian.com/world/2017/apr/23/nazi-looted-painting-auctioned-im-kinsky-bartholomeus-van-der-helst (29.11.17).
  • Corthay Simon, Sur les traces de l’art spolié, diffusée du 18 au 22 juillet 2016 dans l’émission « Tout un Monde » sur la 1ère. Réalisation web : Sylvie Ravussin. https://www.rts.ch/info/culture/arts-visuels/7901887-sur-les-traces-de-l-art-spolie.html (29.11.17).
  • Art Recovery International, Houdon Bust Looted by the Nazis Returned to Polish Government, in Art Recovery International Cases Studies and News, Londres 2015, http://artrecovery.com/2015/10/30/houdon-bust-looted-by-the-nazis-returned-to-polish-government/ (29.11.17).
  • Art Media Agency, Un buste en marbre volé durant la guerre retourne en Pologne in Art Media Agency, Paris 2015, https://fr.artmediaagency.com/122662/un-buste-en-marbre-vole-durant-la-guerre-retourne-en-pologne/ (29.11.17).
  • ATG Reporter, Nazi-Looted Bust Returns to Poland, in Antiques Trade Gazette the Art Market Weekly, Royaume-Uni 2015, https://www.antiquestradegazette.com/news/2015/nazi-looted-houdon-bust-returns-to-poland/ (29.11.17).
  • Roger Valérie, The Discovery and Identification of Jean-Antoine Houdon’s Bust of Diana, a Looted Work Returned to Poland, in The Division for Looted Art (Ministry of Culture and National Heritage), Pologne 2015 http://www.dzielautracone.gov.pl/articles/142-the-discovery-and-identification-of-jean-antoine-houdon-s-bust-of-diana-a-looted-work-returned-to-poland (29.11.17).
  • Neuendorf Henri, Lost Nazi-Looted Jean-Antoine Houdon Bust Returns to Poland After 75 Years, in ArtNet News, New York City 2015 https://news.artnet.com/art-world/nazi-looted-bust-restituted-poland-395391 (29.11.17).

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[1] Art Recovery International.

[2] Corthay.

[3] Art Recovery International.

[4] ATG Reporter.

[5] Analyse dont l’élément déterminant est la présence de deux signatures de l’artiste, l’une sur l’épaule, l’autre sur le dos de la sculpture. Source: Roger.

[6] Roger.

[7] ATG Reporter.

[8] Art Recovery International.

[9] Connolly.

[10] Corthay.

[11] Voir à ce sujet section V infra.

[12] Art Recovery International.

[13] Art Media Agency.

[14] Neuendorf.

[15] Bandle/Chechi/Renold, p.3.

[16] Chechi/Renold, p. 190.

[17] Connolly.

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